Fabrice Bonnifet

ÇA VEUT DIRE QUOI POUR VOUS,
INSPIRER POSITIVEMENT LA SOCIÉTÉ ?

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Fabrice Bonnifet

Directeur Développement Durable & QSE (Qualité-Sécurité-Environnement) du Groupe Bouygues, Président du Collège des Directeurs du développement durable (C3D), Administrateur de The Shift Project et co-fondateur du blog sur l'Entreprise Contributive.

« Neutralité carbone : arrêtons les promesses, devenons inspirants ! » vous conviendrez ?  

L’annus horribilis que nous venons de vivre est l’illustration que les bons vœux des débuts d’année, même s’ils sont agréables à entendre, ne sont pas d’un grand secours dans le réel. De toute évidence, la Covid-19 a réservé, à sa manière, une toute autre orientation pour l’année 2020 à des milliards d’individus par rapport à leurs souhaits. La bienveillance d’un souhait s’efface rapidement devant le pragmatisme d’un fait, tout comme une promesse n’engage que celui qui l’écoute. A l’occasion de l’anniversaire de l’Accord de Paris, d’autres formes de vœux ont fleuri à foison. Ces dernières semaines, nombre de chefs d’Etat ont promis solennellement la neutralité carbone de leur pays à l’horizon 2050. Alors même qu’aucun pays parmi les plus émetteurs de gaz à effet de serre, n’a encore réellement mis en œuvre des actions crédibles qui permettraient d’atteindre l’objectif. Mais pour beaucoup, s’engager, c’est déjà avoir réussi. Il semble y avoir une certaine euphorie dans l’expression d’un meilleur futur, il suffit d’observer la liesse des partisans des leaders politiques lors des meetings. La désillusion arrive en général assez vite, mais on oublie ce décalage entre le dire et le faire… jusqu’à la prochaine promesse. 

Inspirer la société, c’est aussi promouvoir un nouveau journalisme, celui des solutions à impacts positifs, celles qui produisent des résultats tangibles, qui, dans un contexte donné, peuvent être reproduites. Celles enfin dont on va pouvoir s’inspirer pour réinventer des manières de produire sans détruire, en les resynchronisant au vivant.

La temporalité des promesses est inversement proportionnelle aux risques pris par ceux qui les font. Plus l’horizon est loin, plus la promesse est ambitieuse, mais moins elle est sincère ! La sagesse populaire rappelle à juste titre qu’« un tient vaut mieux que deux tu l’auras ». Belle évidence. Dans les temps très incertains dans lesquels nous entrons, il serait utile de modérer les engagements et les promesses au profit d’une accélération de l’action. L’urgence climatique est là. Les catastrophes associées provoquent déjà trois fois plus de déplacements que les conflits armés. Rien qu’en Australie, les méga incendies de ces derniers mois ont tué près de 3 milliards d'animaux sauvages. Mais qui s’émeut à la bonne échelle de cette actualité qui annonce les prémices du chaos ?

Dans les temps très incertains dans lesquels nous entrons, il serait utile de modérer les engagements et les promesses au profit d’une accélération de l’action.  

L’essentiel de la trajectoire climatique de l’humanité pour le siècle en cours est déjà écrite. Les scientifiques du GIEC eux-mêmes semblent abasourdis devant les données enregistrées sur le terrain qui confirment le pire des scénarios. Pour beaucoup cette année a été un cauchemar, mais au train où vont les demi-mesures et le manque de courage des décideurs publics et privés pour véritablement enclencher l’action, les années à venir seront pires. 

Il n’est pas pour autant question de baisser les bras, au contraire. Pour reprendre en main notre destin, il convient aujourd’hui d’inspirer positivement la société ! Lorsque l’espoir s’envole, l’envie d’action émerge. Inspirer les citoyens du monde, c’est notre seule chance d’infléchir dès aujourd’hui, par l’action concrète et mesurable, un futur pour le moins inquiétant. Mais inspirer quoi au juste ? D’abord d’adopter un bon comportement, comme le fait d’être exemplaire, car chacun sait que l’exemplarité n’est pas une façon d’influencer c’est la seule. Etre exemplaire, c’est commencer par prendre maintenant, dans toutes les organisations, les mesures courageuses qui auraient dû être prises il y a 30 ans, lorsque les lanceurs d’alertes ont commencé à s’époumoner en vain. Ensuite, c’est miser sur la confiance et l’intelligence collective pour innover dans tous les domaines au service d'une économie inclusive et sans carbone. C’est redonner du sens au progrès. C’est laisser les individus libres du « comment » agir au cœur des territoires. Inspirer la société, c’est aussi promouvoir un nouveau journalisme, celui des solutions à impacts positifs, celles qui produisent des résultats tangibles, qui, dans un contexte donné, peuvent être reproduites. Celles enfin dont on va pouvoir s’inspirer pour réinventer des manières de produire sans détruire, en les resynchronisant au vivant. Nous devons faire de nos rêves une réalité et faire de nos vies une source d’inspiration pour les autres. Inspirer positivement pour un grand média responsable, c’est fabriquer des récits qui donnent envie d’agir. 

Nous devons faire de nos rêves une réalité et faire de nos vies une source d’inspiration pour les autres. Inspirer positivement pour un grand média responsable, c’est fabriquer des récits qui donnent envie d’agir. 
 
Fabrice Bonnifet