CELINE ROUX
Chief Opperating Officer Newen France
La production, c’est un métier qui pollue (encore) beaucoup ?
La production est, comme toutes les industries, source de pollution. Nous savons que le secteur audiovisuel dégage environ 1,7 million de tonnes de CO2 *. Une première prise de conscience a eu lieu il y a quelques années où le secteur a commencé à évoluer sur le sujet : déplacements collectifs, gestion des déchets, restauration locale sur les tournages… Si l’élan a été freiné par la crise sanitaire, les productions s’y remettent avec autant d'enthousiasme. On est passé d’initiatives individuelles à des réponses plus structurées, avec en particulier le plan Action ! du CNC qui vise entre autres à créer un calculateur carbone commun.
Chez Newen Studios, nous avons mis en place un Comité Green en 2020. Nous voulions nous donner les moyens, construire un plan fédérateur pour centraliser les énergies et fixer des objectifs communs.
Mais avant de nous projeter, nous devions déjà faire l’état des lieux : nous avons donc été le premier groupe audiovisuel français à faire réaliser un audit interne pour mesurer notre empreinte carbone.
Quel est le bilan de cet audit ?
Se mesurer, c’est une démarche assez colossale, puisqu'il a fallu étudier tous les postes, de nos factures d'énergie à nos types de déchets, en passant par l’analyse de nos déplacements et les habitudes de nos salariés (quels types de transport pour venir au bureau, combien de fois par semaine mangent-ils de la viande au déjeuner…). Pour réaliser cet audit, nous nous sommes fait accompagner par une société experte : Workflowers. Il en résulte une empreinte carbone de Newen Studios qui se chiffre aujourd’hui à 3 000 tonnes d’équivalent CO2 par an. Nous nous sommes ensuite fixés deux objectifs ambitieux de réduction : -20 % d’ici 2024 et -30 % à horizon 2030.
Sur quels postes pouvez-vous agir ?
Nous avons six thématiques d’action : les bâtiments, l'énergie, le transport, les déchets, le numérique et la transparence (soit la capacité de calculer l’empreinte carbone de chaque production). Pour cela, des indicateurs vont être mis en place par items (énergie, déplacements…) avec un objectif précis de réduction pour chacun. Par exemple, notre plus grande source de pollution étant les déplacements des équipes, notre objectif sera que le train devienne le mode de transport en France de référence, avec une baisse de l’avion de 20%. Nos nouveaux locaux ** seront écolabellisés, nous visons une vie dans les bureaux zéro plastique, une gestion optimisée des déchets…
Y-a-t-il un chantier qui semble plus important que les autres ?
Sans doute celui qui se voit le moins : la pollution numérique, avec le stockage de nos données (rushs de tournages, archives d’émissions et de fictions…) Le diffuseur, le distributeur et le producteur peuvent garder en mémoire un même projet chacun de leur côté, sur tout autant de serveurs.
L’objectif est d’optimiser notre stockage en visant ce que l’on appelle la sobriété numérique.
Les contenus peuvent-ils aussi être des vecteurs de changement ?
« Plus belle la vie » a été notre laboratoire. Elle est aujourd’hui entièrement écoproduite, et son engagement transparait effectivement dans les scénarios, du simple écogeste intégré dans la vie des personnages aux intrigues plus militantes. Nous avons par exemple travaillé avec le collectif « On est prêt » et accueilli Camille Etienne dans un épisode lors de la Journée de la Terre. D’autres productions, où cela est possible techniquement, suivent aujourd’hui le même modèle, comme « Ici tout commence » sur TF1, où une cuisine écoresponsable est mise en lumière.
Nous produisons également le prochain film documentaire de Cyril Dion Animal, qui interroge la place de l’être humain dans le vivant. A nous de proposer des contenus inspirants et porteurs d’espoir !
* selon la dernière etude réalisée par Ecoprod en mai 2021
* * emménagement prévu début 2022