Fanny Agostini
Journaliste engagée sur Europe1, UshuaiaTV, TF1 et Cofondatrice de l'ONG Landestini
Je suis dans un cas particulier car mon projet de vie personnel est complètement imbriqué dans mon projet professionnel. J’ai fait le choix de travailler sur mon lieu de vie, que j’ai choisi et qui me fait du bien. A travers ce choix, je crois qu’inspirer positivement c’est montrer par l’exemple que c’est possible : des décisions fortes, de rupture, même si elles comportent des risques, peuvent sacrément rendre heureux.
À travers mon métier l’objectif premier reste toujours d’informer et de vulgariser sur les enjeux écologiques.
Comprendre c’est le préalable pour avoir envie de se mettre en action.
Nous sommes face à une tendance qui s’affine et qui s’affirme en ce moment : ce besoin de lien avec la nature est aujourd’hui quelque chose de plus en plus partagé, couplé à une altération de plus en plus rapide de notre habitat. La crise écologique que nous traversons n’est pas un état passager. Nous sommes sur une ligne de crête avec un véritable danger de survie de notre espèce.
Ce que nous vivons est avant tout une crise du lien avec le vivant.
J’entends par là que nous sommes, comme le dit le philosophe Baptiste Morizot, dans une « fin d’expérience avec la nature ». Nous assistons à un glissement des références : aujourd’hui nous savons reconnaître un nombre infini de marques et de logos. Mais lorsqu’il s’agit de distinguer un bouvreuil d’une mésange charbonnière, un furet d’une martre, une tanche d’un goujon c’est une autre paire de manches. Renouer avec cette biodiversité de proximité ne pourra se faire sans éducation et dans une approche sensorielle avec la Nature.
Les autres êtres vivants doivent refaire partie de nos fréquentations :
Aujourd’hui, le combat se trouve sur le palier de notre porte.
Lorsque j’ai imaginé l’émission En Terre Ferme, je ne la concevais pas ailleurs que chez moi, en Auvergne, en faisant ce pari de la décentralisation. J’aurais pu faire ça dans une ferme en Seine-et-Marne, collée à Paris, mais l’idée était effectivement de rester sur mon territoire, celui que j’ai choisi et sur lequel je suis née.
De pouvoir utiliser sur une même unité de lieu, à la fois les paysages et les experts locaux, sur des enjeux éminemment d’actualité et finalement très territorialisés, était primordial pour moi. En Terre Ferme symbolise toute cette réflexion : inspirer les gens qui nous regardent à se mettre en mouvement.
Les enjeux autour du climat et de la biodiversité m’obsèdent depuis des années et il est évident que nous n’allons pas vers une amélioration que ce soit sur les sujets climatiques ou de biodiversité. Il y a malgré tout (et heureusement !) de petites lucioles qui me tiennent !
En somme, je fais ce pari de l’action, de l’optimisme et de la résistance.
Je le fais, ne serait-ce pour moi, pour me sentir bien mais aussi pour mon fils pour qu’il se dise plus tard que sa maman a fait tout ce qu’elle a pu et était du bon côté du manche.
De plus, je crois que les démographes se trompent : notre avenir n’est pas d’être concentré dans les villes, en surnombre dans des espaces restreints, mais de mieux se répartir sur le territoire et de renouer avec le vivant et ce, jusque dans nos métiers. Au-delà du télétravail, je crois au retour à un travail plus proche de la nature, plus manuel, restant très intellectuel : les mains sont l’extension du cerveau.
C’est mon désir profond que nous soyons plus en phase avec les enjeux de notre siècle et donc plus en lien avec ce qui nous permet d’exister. Nous avons franchi les dernières limites de la domination de la nature et si notre intelligence est vraiment celle que l’on se prête, nous sommes disposés à des changements forts.
Et ces changements ne s’apparentent pas à du renoncement et de l’appauvrissement, c’est tout le contraire : c’est du mieux vivre, du bien-être retrouvé et une meilleure santé.
J’espère que ces émissions que j’incarne, à la fois sur TF1 et sur Ushuaïa TV, inspirent et donnent envie de se mettre en mouvement. Mon ONG Landestini est aussi un outil d’action extrêmement concret. Nous travaillons avec les scolaires : nous implantons des potagers dans toutes les écoles de France à travers un concours qui s’appelle « La coupe de France du potager ». Nous installons aussi des incubateurs en France pour aider des porteurs de projets à créer des emplois qui régénèrent le vivant tout en créant de la valeur économique. Le Climate Bootcamp est également un outil qui permet de former des journalistes à la science du climat.
Tout cela montre qu’à tous les niveaux on peut faire bouger les choses : cette boîte à outils que j’utilise me motive chaque jour. Ce qui me plaît, c’est qu’il n’y a pas de frontière entre ma vie privée et mon travail, qui sont alignés.
Fanny Agostini